Ouverte à tous et gratuite, l’exposition « Golden Age« , programmée du 16 octobre au 29 novembre 2020, a fermé ses portes, conformément aux mesures gouvernementales anti Covid-19.
Dans le cadre de ce projet, piloté par la société d’intérêt collectif Hacoopa, 24 artistes, réunis par Lady Bug et Arty Show, ont transformé une maison d’Orvault (métropole de Nantes), destinée à devenir une résidence partagéepour seniors, en lieu de street art éphémèreetpop-up galerie.
Un mois avant son ouverture au public, ils y ont vécu, à demeure, s’y exprimant librement, du sol au plafond,sur 400 m2, partageant leurs parcours et visions respectives de l’âge d’or(du nom de la future résidence), dans un joyeux « déconfinement artistique« . (1)
Retrouvons notre enfant intérieur pour comprendre le rêve éveillé de ce « cercle de poètes chromatiques disparus » et en percevoir la symphonie holistique…
A l’instar de la chanson éponyme de Woodkid, Golden Age ressemble à un voyagemythique vers le bonheur éternel, une évasion de l' »ordinaire citadin« , une transcendance de la réalité, pour une reconnexion à soiet au monde.
Au carrefour de l’histoire de viehumaine, dans ses rapports au Vivant (animal et végétal), l’expo évoque les liens forts entre l’enfance et l’âge adulte, le refus de la souffrance, la jeunesse intemporelle…
Allégoriques ou poétiques, les œuvres abordent aussi bien les valeurs d’abondance, de paix, de justice et de liberté, que les notions d’harmonie, entre les hommes et leur environnement, de douceur, de joie, de bienveillance et d’amour…
Face à cette spiritualité esthétique, le panel d’émotions est aussi fort que la gamme chromatique picturale.
Qui sont les artistes et quels sont leurs messages ?
Face à la pandémie Covid, les communautés artistiques semblent, plus que jamais, trouver dans le concept culturel du vivre ensemble, même éphémère, une force résiliente.
Pour fêter ses 5 ans, l’association rezéenne « La Griffe » a ainsi récemment invité 17 artistes à investir les ateliers Magellan de Nantes afin de créer une œuvre commune, »hors normes », sur le thème de la « Meute« .
Durant une dizaine de jours (29/09 au 10/10/20), le collectif a transformé cet ancien atelier de métallerie des bords de Loire en « écrin de couleurs, d’ambiances et de convivialité » (1), métamorphosant notre regard et exacerbant notre conscience, via son ajna démesuré.
Traversons à présent le « miroir du temps » pour revenir au 07/10 (date de ma visite) et laisser la magie, de cet extraordinaire imaginarium coloré, nous transporter ailleurs…
A l’instar des loups, la symbolique identitaire du groupe est perceptible dès l’entrée de cette « tannière » urbaine : importance de disposer, même provisoirement, d’un « territoire » où se retrouver, « faire avec », autour de besoins et valeurs communs, reprendre des forces, en sécurité…
Crocs menaçants, tel « Akela » (l’imposant mâle alpha du « Livre de la jungle »), la « bête » rouge, jaune et bleue, fantasmagorique, du peintre-dessinateur Bartex (2), incarne, dans la matière, la « griffe débridée créative » de sa « horde », semblant veiller sauvagement sur son clan disparate : têtes félines, canidés et personnages variés en acier, entremêlés de peluches « de tous poils »…
Fil rouge de l’exposition, l’imaginaire immerge le visiteur dans un espace surréaliste, digne d’univers cinématographiques aussi excentriques que poétiques (T. Burton, J.P. Jeunet…).
Bricoleurs(euses), peintres, sérigraphes, plasticiens, sculpteurs(trices), collectionneurs(euses), costumiers(ères) et scénographes se sont ainsi transformés en « peintres du silence », « poètes du cri d’alerte », « pitres des maux »… tout en conservant leurs motivations respectives.
En maints endroits du hangar, les composantes oniriques et humoristiques, de cette confrontation « cœur à cœur », ouvrent de multiples pop-ups subliminales étoilées dans l’âme du visiteur.
Moins long que le Belem(58 m), ou l’Hermione (65 m),le « Shtandart« , réplique de l’ancien vaisseau amiral russe du XVIIIème(34,5 m), conserve pourtant une magnificence royale destinée, originellement, à impressionner les flottes ennemies.
En escale à Nantes, après Rotterdam et St Malo, l’équipage de ce navire-école l’ouvre à la visite, jusqu’au 2 octobre 2020, pour partager, de manière enthousiaste et pédagogique, des passions communes (voiliers, histoire… ) et une philosophie, devenue leur devise : « life is what you make » (1).
« Tenez bon la rampe et, hisse et ho », embarquez à présent,en audio et visio, pour un voyage virtuel dans l’Histoire, la porte ouverte sur des horizons infinis...
Des symboles de puissance colorés
L’actuel Shtandart, réplique de l’ancienne frégate du XVIIIème, tire son nom de l' »étendard » du tsar Pierre le Grand.
En bas et haut,4 cartes maritimes: cellede la mer Blanche (près de la tête droite), la mer Caspienne (à gauche), la mer d’Azov (près du pied droit), ainsi que le golfe de Finlande, avec la moitié du golfe de Bosnie et une partie de la mer Baltique (près du pied gauche).
Les « couleurs » sont si importantes qu’elles sont « envoyées », chaque matin, à 8 heures, accompagnées par 8 coups de cloche.
Outre les saints protecteurs et la représentation des premières victoires maritimes de la Russie (sur l’écusson de Saint-Pétersbourg, gaillard d’arrière), la puissance du navire s’exprime, symboliquement, au travers de la figure de lion de l’étrave.
Un concept patriotique et pédagoqique, dès l’origine
Ancien champion de windsurf russe de Saint-Pétersbourg, capitaine de ce navire, et nostalgique des grands voiliers, Vladimir Martus est à l’origine du projet de reconstruction, à l’identique, du trois-mâts d’origine, demeuré dans les mémoires en tant que navire national de valeur, depuis sa destruction, en 1727.
« Les bateaux anciens, on ne peut pas les ramener du passé, mais on peut en construire des répliques pour offrir aux gens ce qu’était la voile, à l’ancienne. » (V.Martus-Maritima Info 2018)
Retour en 1994. 3, 56 minutes pour revivre ce chantier, éducatif et patriotique, qui pris fin en 1999 :
Caractéristiques techniques du bateau, en synthèse
longueur de la coque : 34,50 m
Hauteur du grand mât : 33 m
Tirant d’eau : 3,30 m
Equipage : 7 (navigation moteur) ou 12 (navigation à la voile)
14 voiles
7 canons (28 autrefois)
Navigation : transport de 40 personnes, dont 10 d’équipage.
De manière générale, et notamment en temps de crise, l’attention au Vivant me semble participer de notre indispensable écologie humaine.
Hier, ma rencontre avec ce pic vert, « hôte régulier » de notre site protégé, s’est doublée du plaisir d’un intermède photographique, prétexte, aussi, à cette fantaisie poétique… (1)
En ce temps pluvieux, brumeux, automnal, où des lombrics terrestres cherchaient l’air, en surface,
un noble Picidé, familier de ces lieux, se trouva ravi de cette bonne aubaine.
Le bec long et pointu, fièrement campé sur ses courtes pattes griffues, il guettait,
dans le jardin herbu, sous l’ombrelle végétale d’un albizia, semblable à quelque dais.
Creusant et piquant, dans la terre nourricière, il demeura longtemps dans cet eden fertile
à goûter, sous l’averse, au bonheur du site naturel, situé en cœur de ville.
Dans sa redingote, vert et jaune doré, académique et solennel, il s’envola ensuite, solitaire,
la calotte rouge vif, sur son crâne, rappelant les vertus cardinales de tout « ver ». (2)
« La résilience, c’est l’art de naviguer dans les torrents » (B.CYRULNIK)
En amont des Journées du Patrimoine 2020, le jardin du Muséum d’Histoire Naturelle de Nantes accueille, jusqu’au 27 septembre 2020, l’exposition photos « Nature native from Seattle to Nantes« , organisée par ces 2 villes, jumelles depuis 1980.
Accrochées aux grilles du jardin, comme autant d' »attrape-rêves », les 18 créations graphiques, de 4 artistes des communautés autochtones de Seattle et du Pacific Northwest, témoignent d’un art résilient, hautement symbolique.
Guidés par ces poissons, « plongeons dans leur flow » singulier…
Seattle est la seule grande ville des Etats-Unis d’Amérique qui tire son nom d’un chef autochtone (Si’ahl, chef du peuple Suquamish et Duwamish). Quoique minoritaires (moins d’1 % de la population actuelle), les « natifs » conservent une culture extrêmement dynamique.
Liés par leur attachement à la terre, autant que leurs racines communes (« peuples premiers », à l’histoire souvent douloureuse), les artistes de l’expo. appartiennent, pour leur part, à 3 tribus Nord-Amérindiennes différentes :
Dans le contexte de la crise sanitaire, leurs messages d’amitié, d’altruisme et d’espoir, destinés aux nantais, puisent poétiquement aux sources de leurs traditions ancestrales et de leurs liens spirituels harmonieux, cosmiques même, avec leur environnement naturel.
Dans cet interview, d’août 2020, accordée au comité de jumelage Nantes-Seattle, leur présentation confirme la congruence de leur démarche personnelle et professionnelle (artistique, pédagogique, patrimoniale, environnementale….).
En revenant sur l’édition 2019 de la « nuit européenne des chercheurs« , un récent voyage sur « la toile » m’a permis de découvrir le » blob » (*), auquel Audrey Dussutour, éthologue du CNRS de Toulouse, consacre une grande partie de ses travaux de recherche.
Une expérience de sérendipité, digne du conte de Louis de Mailly, que vous avez peut-être déjà vécue, dans la nature, en croisant ce mystérieux « physarum polycephalum« , sans probablement imaginer ses pouvoirs surnaturels.
« Aux frontières du réel », suivons cette » blob-trotteuse » passionnée pour découvrir ce rampant, au thésaurus imprécis qui, au-delà de son aspect et de son odeur de moisi, est incroyablement attirant…
Caché sous les écorces, ou dans certains coins sombres, à l’abri de la lumière, ce myxomycète(du grec « myxo », gélatineux, et de la racine « myc », champignon), vit principalement dans les sous-bois. On en trouve sur différents territoires de notre planète.
Il peut se présenter sous différentes formes (rond, arborescent, informe…) et couleurs (blanc, rose, noir, vert…), même si le jaune est plus fréquent.
En réalité, le blob est inoffensif. Apparu sur Terre, il y a près d’un milliard d’années, il est même indispensable à notre écosystème (biodiversité via la génération de micronutriments nécessaires aux plantes, recyclage des métaux lourds…).
» Dans l’évolution, c’est un chaînon manquant entre les organismes unicellulaires et nous. » (Audrey Dussutour – Journal du Dimanche, 31/05/17) (1)
Découvert en 1973, dans le jardin d’une américaine, ce microorganisme eucaryote suscite l’intérêt des médias depuis lors. Jusqu’aux recherches du CNRS, cette créature semblait néanmoins inclassable.
Nichampignon, ni plante, ni animal, le blob est en fait un organisme unicellulaire dont le corps (plasmodium) peut potentiellement atteindre 10 m2 (contre 0.01 pour une cellule humaine).
Ce n’est toutefois pas la moindre de ses étonnantes capacités. En effet :
il se repère parfaitement dansl’espace,bien qu’il n’ait pas d’yeux,
sans nez, il respire pourtant,
dépourvu de bouche et d’estomac, il digère néanmoins sa nourriture (bactéries, champignons, dans la nature ; avoine, en laboratoire) ; manger est essentiel à sa santé, aussi passe-t-il sa vie à ramper derrière la nourriture. (1)
sa croissance est exponentielle : il double de taille chaque jour,
dénué de pattes, il se déplace en utilisant son système veineux (dans lequel circule son « sang »), à raison de 2 à 4 cm/heure. Ses pseudopodes (déformations de sa membrane plasmique) lui permettent même de se déplacer simultanément dans plusieurs directions (un pas en avant, un demi-pas en arrière).
avec 720 genres sexuels, il se reproduit facilement, par spores (comme le champignon),
il ne craint ni l’eau, ni le feu mais fuit la lumière,
coupé en deux, il cicatrise en 2 minutes. En cas de dispersion, les morceaux peuvent même devenir des clônes indépendants,
après des années sans manger et se réveiller, cet « ovni » (***) peut se régénérer si on le réhydrate et le nourrit. Quasiment immortel !..
Ses propriétés antifongiques et antibactéricides ouvrent de multiples et positives perspectives médicales et technologiques (dépollution des sols, nouveaux antibiotiques, traitement efficace du cancer, optimisation de réseaux…).
Un génie de l’adaptation
Sous son allure d’œufs brouillés, et bien qu’il n’aitpas de cerveau, cet organisme primitif, cache également une singulière intelligence.
Dans une étude, publiée dans Proceedings of the Royal Society B, Romain Boisseau (chercheur en biologie de l’Université Toulouse III Paul-Sabatier), David Vogel et Audrey Dussutour (équipe du centre de recherche sur la cognition animale du CNRS), ont démontré que physarum polycephalum sait tirer des leçons de ses expériences afin de se nourrir sans risque.
Confrontés à des substances amères (café, quinine ou sel), différents groupes de protistes, d’abord méfiants, ont réalisé leur innocuité et fini par les traverser pour accéder à leur source de nourriture.
Après quelques jours, sans stimulus, l’habituation n’opère néanmoins plus.
Autre découverte (3-4) : le blob est capable de mémoriser et communiquer ses apprentissages, à un congénère, en fusionnant avec lui (explications de ce processus transmissif ci-dessous) :
L’art peut agir sur l’inconscient individuel et collectif en mettant » l’homme devant ses responsabilités : rétablir, dans l’urgence, les liens d’équilibre entre lui-même et son milieu vital « . (P. Ardenne – Un art écologique – Ed. La Muette/Le Bord de l’eau).
L' »effet Dumbo » de l’Elephant parade(1) qui s’est déroulée, à Nantes, du 21 décembre 2019 au 5 janvier 2020, dans le cadre de la 13ème édition du Noël aux Nefs des Machines de l’île, devrait ainsi agiter longtemps nos mémoires…
Depuis quand ? : Fondée en 2006, par Marc Spits et son fils Mike.
Pourquoi ? : Lors d’un voyage en Thaïlande, Marc avait rencontré Mosha, un bébé éléphant, amputé d’une partie de sa jambe après avoir marché sur une mine.
Pour quoi ? : Créer une structure rentable, à long terme, afin d’assurer un avenir durable pour Mosha et d’autres victimes éventuelles.
Quelles actions, depuis 2007 ?:
*Financement de programmes de protection et de préservation des éléphants,via :
1. la création artistique de 1 500 statues uniques, de 150 cm, en fibre de verre; 1 900 artistes contributeurs, à propos desquels Marc Spits disait, en 2013 :
“No matter the artist, celebrity or painter, this dynamic group of people are gathering, on a global level, to be a part of an incredibly important cause to paint a brighter future for a species now threatened with extinction.”
2. l’organisation d’expositionsinternationales annuelles (30 parades, à ce jour).
3. le reversement de 20 % des profits nets issus (vente de statues et/ou de modèles réduits en résine de 10, 15 ou 20 cm), avec un don minimum de 50 000 euros par an.
*Sur la base de cadeaux personnalisés, destinés à démarquer positivement les entreprises partenaires de leurs concurrents, programmes de Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE) spécifiques et communication originale ad hoc.
Parmi les nombreux partenaires, qui exposent des éléphants dans leur hall d’entrée, citons : The Peninsula, Shangri-La, David’s Kitchen, Chang Beer, BMW, Mercedes ou River City, etc.
Invitée par l’Union compagnonnique de Nantes, lors des Journées du Patrimoine 2019 (1), Armèle Périgaud est, en France, l’une des dernières repasseuses-« brodeuses en blanc » decoiffes (moins d’une vingtaine en Loire-Atlantique).
Même si elle n’a pas été formée par cette institution (2), Armèle incarne, dans ses savoir-être et savoir-faire, la tradition artisanale et folklorique que Frithjof Schuon appelait la « fonction intellectuelle du peuple » (« De l’unité transcendante des religions« -Gallimard 1948).
En parfaite congruence avec le site muséal, les valeurs et la devise des Compagnons (« Ni se servir, ni s’asservir, mais servir« ), elle faitde la sauvegarde du terroir, et de ce métier traditionnel, quasi disparu, un « art de vivre ».
Armèle Périgaud est née à Nantes, il y a 75 ans. Selon ses propres termes, elle a : « appris à broder avant de savoir lire et écrire »… « Dix ans d’apprentissage et quinze de pratique sont nécessaires pour devenir une bonne brodeuse».
La coiffe, signe des femmes du peuple
Sa coiffure, sa coiffe, sa tenue impeccable, ainsi que sa châtelaine, accrochée à son tablier… tout démontre son goût de l’apprêt, du beau, de l’élégance et sa fierté. « La coiffe est un véritable « marqueur identitaire« , partage-t-elle, avec un regard et un sourire passionnés, le « tam du » (chignon torsadé) coquettement rangé dans son noir filet.
Partout, le blanc domine, rappelant la connotation religieuse (pureté, dignité, perfection, couleur monastique…), que l’attitude, souvent réservée, ou recueillie, des femmes coiffées, semble avoir toujours corroborée.
D’un long et quotidien apprentissage familial, Armèle conserve la patience, la dextérité et l’amour du « bel ouvrage », comme en témoigne sa collection. Au total, plusieurs centaines de coiffes, bonnets d’enfant (Second Empire, notamment), châles, dentelles, mouchoirs, linge fin (XIXe siècle, début XXe), et différents objets servant à broder et/ou repasser…
Au-delà de sa valeur patrimoniale (histoire, architecture, reconnaissance de l’UNESCO depuis le 16/11/10),cette cayenne est remarquable à plusieurs titres : conservatoire vivant des savoir-faire, elle témoigne, en effet, aussi, des valeurs et rites des Compagnons du Tour de France des Devoirs Unis, au travers d’œuvres, d’outils et de rubans colorés.
Au faîte du bâtiment, la salle « Agricol Perdiguier » se vit comme un voyage initiatique « philosophico-spirituel ». A l’instar de l’itinérance des aspirants compagnons, tout commence par une histoire de « couleurs« …
Maître Jacques
Musée compagnonnique des Devoirs réunis-Nantes
Dessin à la plume rehaussé d’aquarelle et de gouache – Leclair, vers 1830 (Musée du compagnonnage, Tours)
Depuis le XIIIème siècle, les signes « kabbalistiques » guident les compagnons durant leur parcours (tour de France visant les apprentissages techniques, la découverte des métiers, des concepts, moraux et sociaux, transmis par les maîtres). Abstrus, pour les non-initiés, ils représentent, en quelque sorte, pour les jeunes ouvriers, un voyage ascensionnel et intérieur, au cœur même du divin.
Le sens des couleurs et de la lumière participe de cette mystique. Par contraste, leurs nuances servent effectivement de révélateurs de la réalité de notre existence et de notre essence intrinsèque.
Musée compagnonnique des Devoirs réunis – Nantes
Avec la canne, longue ou courte, les « couleurs » sont emblématiques de la société à laquelle un compagnon appartient. Elles comportent ses initiales ou des ornements spécifiques, selon ses grade et fonction. Leur taille varie (1m à 1m50 de long ; 6 à 10 cm de large).
Les « livrées » unies originelles sont devenues des « rubans« . On frappe les étoffes envelours avec des fers, à chaud, tandis que des rouleaux gravés sont utilisés pour les tissus en soie moire, brodés d’or et d’argent.
Face au golfe de Gascogne, Biarritz est un « amphithéâtre » ouvert aux vents marins. A l’avant-scène, au bord de sa grande plage, l’hôtel du Palais, construit en 1855 par Eugénie de Montijo, au style somptueux et polychromique du second empire, néo Louis XVIII, en demeure l’emblème. Comme un « manteau d’Arlequin » virtuel (*), il masque, côté rue, une église orthodoxe qui donne accès, « en coulisses », à d’autres trésors iconiques, « fenêtres sur le monde invisible »…
Signe de ma « bonne foi » chrétienne et de la promesse faite, l’été dernier (**), à Serge Cheloudtchenko, marguillier des lieux, l’appel aux dons,indispensables à larestauration de cet édifice, justifie aujourd’hui cette « tribune numérique » et une scénographie éclairée par son halo divin.^^
Depuis 1931, le bâtiment, de style byzantin, est placé sous la juridiction du Patriarcat œcuménique de Constantinople. Exceptionnel dans la région, il a été classé « monument historique » en juin 2016.
Malgré son statut, et l’entretien de ses fidèles (Russes, Georgiens, Ukrainiens, Serbes, Moldaves, Biélorusses, Français), l’église est en péril. Ironie dramatique : le climat océanique aquitain bienfaisant (pur, riche en ozone et en brome…), qui avait attiré, au XIXe, une importante colonie aristocratique russe, est également marqué par des entrées maritimes (vents forts, humidité, salinité) qui dégradent fortement l’édifice, pourtant distant du « frons » de mer.
* Construction : en 1888 (après la chute de Napoléon III), le tsar Alexandre III, et le père Hérodion, obtiennent du gouvernement républicain français, anticlérical, un accord pour bâtir l’église, à condition qu’elle n’ait pas de cloche et soit édifiée comme une chapelle d’appartement, d’où la présence d’un logement privé, au rez-de-chaussée, destiné au prêtre.
A partir de 1890, l’église sera construite par les architectes Nikonoff (russe attaché au Saint Synode) et Tisnès (français de Biarritz).
Elle sera consacrée en 1892, en présence de l’ambassadeur de Russie en France et de plusieurs membres de la famille impériale russe, dont la tsarine Maria Feodorovna qui fréquentera régulièrement la station balnéaire jusqu’aux années trente.
Loin de la magnificence de la megalis ecclesias de Constantinople, le patrimoine matériel et immatériel séculaire de l’église biarrote touche néanmoins la mémoire et le cœur des hommes.
Ornée d’icônes provenant de Saint Pétersbourg, l’église comporte une magnifique «iconostase», en bois de chêne sculpté, qui évoque le voile de Salomon et symbolise la séparation et la transition entre les espaces corporel (nef) et spirituel (sanctuaire).
Au centre, les Portes Royales, symbolisent l’entrée du royaume de Dieu. Y sont représentés la Vierge Marie, l’archange Gabriel, ainsi que les quatre évangélistes, encadrés par la Mère de Dieu (avec son enfant) et le Christ Sauveur.
Attaché à l’église, il veille à préserver les traditions autant que le bâtiment. L’archevêque Gabriel de Comane, exarque œcuménique, lui a d’ailleurs remis, en 2010, une « gramata« , pour le récompenser de son engagement.